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ATK : « Pour nous, rapper c’était comme jouer au basket »

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Axis et Cyanure par Jeanne Frank

Le milieu des années 90 a été une période féconde pour le rap français. C’est en effet durant cette époque qu’il a acquis ses lettres de noblesse. Durant ces années un peu folles, se forme un groupe très atypique : ATK. Acronyme de « Avoue que Tu Kiffes », ce collectif est au départ une bande de potes traînant dans l’est parisien (12ème, 18ème et 19ème arrondissements) qui se forme à l’occasion d’un concert en 1995. Quelques années après, en 1998, le groupe restructuré (« de 21 on passe à 7 », même s’il semblerait que le collectif ait compté plus de membres que cela) sort l’un des plus grands classiques du rap français : Heptagone. 16 ans et plusieurs albums après (ensemble ou dans leurs coins), ATK reste un groupe légendaire dans le cœur de beaucoup de fans de hip hop français. Alors que le collectif se reforme le temps d’un festival,  Axis et Cyanure, deux membres emblématiques nous accordent une interview.

Sound Cultur’ALL : Présentez-vous pour ceux qui ne vous connaissent pas !

Cyanure
Cyanure par Jeanne Frank

Cyanure : Moi, c’est Cyanure. Je vais ressortir ma bio twitter : dans le hip hop depuis 1989, Section Lyricale depuis 1992, Klub des 7 depuis les années 2000, ATK depuis 1995 et forever.

Axis : Moi, c’est Axis d’ATK, c’est beaucoup plus simple (rires).

Cyanure : T’as aussi travaillé avec beaucoup de rappeurs en tant que producteur.
Axis : Oui, c’est vrai.

SC : Vous êtes très bientôt sur scène au Festival Terre hip hop à Bobigny [ndlr : l’entretien a été réalisé le jeudi 6 mars 2014]. Est-ce que ce retour sur scène pourrait annoncer une prochaine sortie du groupe ?

C : On est dans une période où on a tous plus de temps pour nous, donc on occupe notre temps comme on l’a toujours fait.

A : Mais il n’y aura plus jamais retour d’ATK. La première raison est l’absence de Fredy [ndrl : Fredy K, décédé le 6 novembre 2007 suite à un accident de moto]. Ensuite, plusieurs membres du groupe habitent relativement loin maintenant, ça devient vraiment compliqué. Cependant, il y aura toujours des connections entre nous. Après, là, il y a DJ Chrone qui sort un projet où on peut retrouver tous les membres d’ATK avec Futur Proche et Tupan … Et on se retrouve sur des projets ponctuels

C : Il y aura des morceaux à droite à gauche qui sortiront quand on arrivera à se coordonner. Maintenant, un albumATK ça me paraît aujourd’hui impossible.

A : On a aussi tous avancés chacun de notre côté, même si on prend toujours du plaisir à se rencontrer et à confronter nos univers différents.

SC : Les trois Oxygènes et Silence radio étaient à l’initiative de Fredy. Est-ce que  son décès a annoncé la mort d’ATK ?

A : Je pense que Fredy a pu faire vivre ATK à sa manière. Maintenant, nous faisons tous vivre aussi ATK à notre manière. Mais c’était le membre le plus actif et celui qui concrétisait les projets. On a tout fait plein d’albums mais on n’a pas forcément su les sortir. Fredy savait le faire, il allait au bout des choses. On est triste que tout ça soit fini, car on aimait voir vivre ATK. Mais ce n’était pas la seule manière dont le groupe vivait. Par exemple, quand je voyais Cyan’ monter sur scène avec le Klub des 7, je le voyais à la fois comme un membre du Klub des 7 mais aussi comme quelqu’un d’ATK.

C : C’est aussi lui qui réservait les studios. C’était réellement le ciment du groupe. Il nous tirait aussi, car ce n’était pas toujours évident de donner rendez-vous à 4-5 personnes : il en a sué. Personne n’aurait eu ce courage de nous motiver comme il l’a fait. ATK, c’est toujours resté, sans être péjoratif, un groupe amateur. On était là pour le divertissement. Nous réunir en répétition était compliqué.

A : Pour nous, rapper c’était comme jouer au basket : le jour où tu n’as pas envie d’y aller parce que t’as mal au pied où la flemme, tu n’y vas pas. Fredy avait tout le temps affaire à ça. En plus c’était à une époque où on commençait à bosser, donc où on était moins disponibles. Mais est-ce que ATK ce n’est pas ça aussi ?

C : Certains nous disent : « Ouais mais ATK vous avez raté votre carrière ». On a fait comme on avait envie de le faire à l’époque. Je n’ai pas forcément envie de me retrouver à la place d’autres gens qui ont fait trop de concessions pour réussir. On n’a jamais abordé ça comme un truc commercial. Aujourd’hui, beaucoup de jeunes artistes démarrent en pensant commercial.

Axis
Axis par Jeanne Frank

SC : Justement, quel regard portez-vous sur le rap actuel ? On assiste à l’émergence de groupes qui n’ont rien de « street » mais qui kiffent kicker comme vous à l’époque. Et puis, il y a une scène alternative – dont vous avez fait partie des pionniers – qui se porte bien.

C : Ça fait un peu vieux con mais il faut passer des classes. Nous, avant d’avoir pu aller en studio et sortir un album, on a passé des classes. On répétait dans la rue, on faisait nos flyers nous-même, on a fait un concert, on a sorti des mixtapes. On a eu une petite évolution avant de sortir un premier album. Aujourd’hui, il y a le net qui pullule d’artistes.  Sur le web, un type que tu ne connais pas va te sortir un premier freestyle, va faire 200 000 vues, ce qui inverse la tendance. Le mec va déjà sortir des morceaux et ensuite faire des concerts, alors que pour nous c’était dans l’autre sens. On a peut-être influencés toute la nouvelle scène alternative mais des mecs comme La Caution ou TTC ont été plus influents. Cependant, ça fait plaisir, ça a démocratisé le rap. Quand on voit des mecs comme 1995 qui sont des blancs avec des coupes de cheveux aléatoires, moi je trouve ça cool. Quelques part, la barrière vestimentaire du rap et ses codes ont pu tomber et tout le monde peut rapper. Moi, je suis plus de ceux qui prône que tout le monde peut rapper, plutôt que de ceux qui disent que le rap n’est que social. C’est faux, le rap qu’on écoutait en 1989, c’était aussi un rap festif et ce n’était pas qu’un rap que social.

A : Moi ce que je remarque c’est que c’est beaucoup plus diversifié qu’avant. Avant tous les rappeurs suivaient la tendance. Aujourd’hui, toutes les tendances s’expriment. Après, il y a la dimension commerciale qui est arrivée, alors que c’était moins présent avant. Mais c’est normal : dès qu’un milieu se démocratise, les gens cherchent à faire du profit avec.  C’était logique et couru d’avance mais c’est ce que j’aime moins. Après, pour revenir aux propos de Cyanure sur les MC’s qui émergent très vite, c’est plus lié à la société qu’au rap en particulier. La télévision c’est pareil : les gens émergent et disparaissent le lendemain. Ce qui est intéressant de voir c’est que seuls les gens doués restent. C’est un autre moyen de sélection. Avant seuls les bons émergeaient. Maintenant, tout le monde émerge et les gens doués restent. Il faut juste attendre que ça se nettoie et ne pas se jeter sur les artistes parce qu’ils font beaucoup de buzz. Il faut prendre le temps d’écouter. Le public doit effectuer un plus grand travail de sélection qu’avant, parce que le rap est devenu de la variété actuellement. Il faut le traiter comme tel : tu vas trouver de tout.

SC : Vous ne pensez pas avoir été trop en avance sur votre temps justement ?

C : Un mec me faisait remarquer en écoutant Nos rêvent partent en fumée ou 20 ans qu’on était très matures dans l’écriture par rapport à notre âge. On avait une certaine avance dans ce registre par rapport à d’autres rappeurs. Mais on a souvent entendu des gens nous dire : « Je vais te dire quelque chose mais ne le prends pas mal, j’aime pas le rap mais vous je vous aime bien ! » En fait, on avait le côté rap – car c’est notre culture – tout en étant capable de s’ouvrir aux gens,  grâce aux samples notamment. Il faut savoir qu’Axis a été l’un des premiers à avoir samplé de la musique classique. Il samplait en fait tout et n’importe quoi, alors qu’avant, les mecs se contentaient de sampler des trucs de rap ou du James Brown.

A : En fait, je me suis moins inspiré de sons qui existaient déjà dans le rap. En France, les gens n’aimaient pas les sonorités classiques. Voilà comment ATK est devenu le symbole du piano-violon qui est devenu par la suite tellement courant que ça a saoulé tout le monde. J’achetais constamment des disques et je samplais tout ce qui me plaisait. Les CDs de musique classique n’étaient pas très chers à l’époque dans les stands sur les marchés. J’en prenais plein et je m’écoutais ça. Sur 10 CDs, je trouvais un sample. Je prenais des heures et des heures pour m’écouter tout ça. Le bon côté, c’est qu’aujourd’hui, j’ai une grande culture musicale dans tous les domaines. J’ai même été chercher des trucs dans la polka : tout ce qui était écoutable, je l’écoutais (rires) !

SC : Mais vous êtes aussi arrivés à la bonne époque : à un moment où les  anciens devenaient matures et où une nouvelle génération ne pensait qu’à kicker de manière technique…

A : On est tombés au moment où il avait de très bons rappeurs et où le public en redemandait. C’est le propre de beaucoup de gens qui émergent. 1995 arrive au moment où les gens ont à nouveau envie de réécouter du rap technique et de retrouver les sources. C’est juste une question de timing.

SC : A l’époque où l’aventure a commencé et que vous étiez une vingtaine, vous imaginiez vraiment sortir des albums et avoir du succès ?

A : Pour nous c’était vraiment l’équivalent d’aller jouer au basket. On appréciait le basket mais c’était assez fatiguant. Donc on avait le choix entre jouer au basket et faire du rap. Ça nous permettait aussi de nous occuper autrement. C’était une activité amusante et vu qu’on n’était pas dans une démarche marchande, on s’est dit : « C’est drôle et si on invitait du monde ». On a ainsi récupérer tous les gens qui voulaient rapper dans le quartier et on s’est retrouvé à 21 !

C : Même 25 en fait…

A : Même plus ! Parce qu’on était 25 officiels. Mais il y avait les potes des potes des potes, etc. En concert, on se retrouvait à une trentaine à rapper. On avait vraiment aspiré tout le quartier. Et après, forcément ça ne peut pas marcher parce qu’il y avait trop de démarches différentes à l’intérieur.
C : Et en plus, quand on commence avec ATK en 95, c’est très différent d’aujourd’hui. Actuellement, un jeune qui démarre va commencer par sortir sa mixtape en téléchargement sur Itunes assez facilement. A l’époque, sortir un album c’est une toute autre démarche. Tu te disais qu’il fallait que t’accède à un studio à prix abordable, que tu aies de l’argent pour presser tes disques, etc. On ne s’était jamais dit quand on était une vingtaine – ce qui a duré moins d’un an finalement – qu’on allait sortir tous ensemble un disque. Mais on attirait les gens. Dès qu’on allait en concert, il y avait toujours un mec qui voulait nous produire. Moi, j’étais le plus vieux, j’avais 19 ans. Fredy était le plus jeune, il avait 13 ans. T’imagine 25 mecs entre 13 et 19 ans qui rappent tous pas trop mal, c’est hyper-impressionnant : on attirait les regards.

SC : Justement, est-ce que diviser par 3 le groupe n’a pas été nécessaire pour avancer, quitte à se séparer de bons éléments comme Pit (Baccardi) ?

A : On n’a pas calculé. Rien n’était planifié. On ne peut même pas expliquer comment ça s’est passé. Mais c’est sûr que 21 ans ça devenait compliqué. Donc on se voyait par petits bouts. Un jour on n’a fini par décider de continuer le truc autrement, ce qui a soudé les membres qui restaient. Ça a été nécessaire, comme tu le dis, d’une certaine manière. Il a quand même fallu expliquer aux autres qu’on n’avait pas besoin d’eux, car c’était ça la réalité.

C : Sur les plus de 20 personnes, il n’y avait pas de vrais leaders. Il y avait une vingtaine de membres qui étaient chacun au même niveau et pensaient chacun de leur côté. Axis faisait les instrus donc avait une position stratégique. Il y avait Loko et Matt qui en faisaient également. Mais, c’était principalement Axis qui les faisait, donc il était le seul qui pouvait vraiment sortir du lot. C’était donc très difficile à gérer, d’où l’envie de certains d’aller voir ailleurs. Nous, nous ne nous sommes pas sentis lésés mais peut-être que d’autres oui.

A : Mais c’est une bonne chose que ça se soit fait, sinon ça n’aurait été nulle part. Il fallait surtout lancer la machine. Après ça s’est fait naturellement. Je suis très content de ce qui s’est passé. Je suis encore aujourd’hui en contact avec tous les membres. Donc, je ne peux pas te dire que ça s’est mal passé pour certains. Beaucoup seront présents sur scène à Bobigny.

SC : Je me rappelle d’une interview d’Eva Ries, la responsable marketing du premier album du Wu-Tang Clan, qui déclarait en parlant du crew : « C’est en même temps le plus grand groupe de rap du monde et le plus amateur ». Toutes proportions gardées, on ne pourrait pas dire qu’ATK est au fond un groupe qui a marqué le rap français tout en restant amateur ?

A : C’est un peu ça mais se comparer au Wu-Tang c’est difficile. La comparaison est possible sur un aspect théorique mais je ne pense pas qu’on ait marqué le rap français autant qu’eux ont marqué le rap en général.

C : Même nous ils nous ont marqué.

A : C’est vrai que les gens sont souvent étonnés, ils pensent qu’on roule dans des grosses voitures et qu’on vit bien du rap, alors que pas du tout.

C : Même parmi les proches, ils pensaient qu’on avait de l’argent, alors que non.

« Mon kiff c’est de faire de la musique, la partie commerciale me gonfle royalement. » Axis

SC : Sinon pour en revenir plus à l’actualité : Axis, ton retour en solo était évoqué. Il y a eu notamment un clip intitulé ATK qui était sorti, c’est toujours d’actu ?

A : Les gens me parlent constamment de retour. J’essaie de leur expliquer que c’est juste que j’ai actuellement plus de temps donc que je rappe un peu plus. Donc, je me fais plaisir mais sans objectif particulier. Si demain je n’ai plus le temps, j’arrêterai tout. Pour l’instant, je fais mes sons et je me fais plaisir. Les gens qui nous apprécient nous suivent et moi ça me va : je n’ai pas besoin de plus.

SC : Et aucune envie de sortie précise ?

A : Pas particulièrement. Je me demandais si ça valait le coup de sortir un album. Mais je n’en sais finalement rien. Je me projette très rarement. Pour le moment, j’accumule des morceaux. Si à la fin ils me plaisent, pourquoi pas sortir quelque chose, mais ce n’est pas un objectif. C’est vrai que j’ai quand même envie de faire un truc. Mais je n’ai aucune idée du format : est-ce que ça va être gratuit ou payant, du MP3 ou du physique ? Mon kiff c’est de faire de la musique, la partie commerciale me gonfle royalement. Je n’ai pas pour projet d’être une star ou quoi que ce soit, donc à partir de là, je ne me prends pas la tête.

SC : Et Cyanure, tu nous ponds un jour un solo, histoire d’arrêter d’être un éternel rookie ?

C : Ouais (rires). Mais moi, je m’attache vraiment aux trucs physiques. J’ai vraiment envie d’avoir un jour chez moi le disque de Fredy, celui de Freko, celui d’Axis, etc. Et je veux vraiment mettre mon album parmi tous ceux-là, parce que pour moi c’est avant tout une histoire d’amitié plus que de rap. C’est d’abord personnel. Je n’ai pas forcément envie d’aller au-delà des frontières. Mais comme Axis, c’est aussi une histoire de temps.

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Cyanure et Axis par Jeanne Frank

 

SC : Et peut-on envisager un retour du Klub des 7 un jour ?

C : Jamais ! Tout simplement parce que le Klub des 7 c’était avec Fredy.

SC : Vous avez quand même sorti un album à 6 !

C : Ouais mais on a commencé les enregistrements avec Fredy. On avait déjà 3 morceaux avec Fredy. On a finalement décidé de finir l’album et d’enchaîner avec un tournée qui s’est bien déroulée sur la première partie et un peu moins sur la seconde. Et puis aujourd’hui, personne n’a envie de travailler avec Fuzati. C’est vraiment un projet à 7. On pouvait le commencer à 7 et le terminer à 6 mais on ne pouvait pas commencer à 6. Par contre, on se voit toujours avec James Delleck, Le Jouage et Gerard (Baste). On peut aussi se croiser avec Detect. On s’appelle quand on a des concerts pour monter sur scène.

SC : Un mot pour finir ?

C : L’année prochaine, en 2015, ça sera les 20 ans d’ATK et c’est passé hyper-vite ! On ne se rend pas compte, on a l’impression d’être encore d’être dans le gymnase. Le rap nous a permis de vivre des moments inoubliables et de rencontrer pleins de gens. Qu’est-ce que je pourrais ajouter ? Les gens faites des trucs, ayez des activités et sortez !

A : Rien à ajouter de plus !

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Doc Gynéco : « Les cités sont remplies de footballeurs et de rappeurs qui ont raté leur carrière. »

Entre son humour, son style nonchalant et sa passion pour le ballon rond, Doc Gynéco est un personnage atypique dans le monde du rap. Malgré une carrière en dents de scie, celui qui se revendique « chanteur de rap » restera à jamais l’auteur de l’un des meilleurs albums de l’histoire du rap français : Première consultation. Alors que beaucoup pensaient sa carrière finie, Bruno Beausir de son vrai nom a annoncé un retour imminent. L’occasion pour RAGEMAG de le rencontrer à son entraînement à Courbevoie pour parler football et rap.

Tu es un grand passionné de foot. Que penses-tu de la nouvelle formule du PSG ?

C’est toute une histoire depuis que le Qatar a pris le pouvoir ! Cette équipe a de l’argent mais plus d’âme. Ça ne sera même pas profitable au football français, d’ailleurs est-ce qu’il y a des joueurs français dans cette équipe ?

Dans le 11 type, il y a Blaise Matuidi, voire Adrien Rabiot de temps en temps.

C’est bien ce que je dis. Deux, c’est rien !

Mais s’ils font un jour comme l’OM de 1993 et remportent la Ligue des Champions ?

Ils n’auront jamais l’esprit. Ils pourraient faire mieux que Marseille sur le plan sportif mais pas sur le plan humain. C’est juste une machine de guerre comme dans Ocean’s Eleven. Avec l’argent qu’ils investissent, ils vont devenir les Harlem Globetrotters du foot et recruter le joueur qui serait capable de marquer en pétant ? (il éclate de rire) Mais nous on s’en fout, on n’a pas besoin de joueurs qui savent tout faire. Une équipe doit avoir une âme et un esprit. C’est une équipe composée de bêtes curieuses.

Selon toi, Paris, Monaco et leur pléiade de stars vont-ils rendre la Ligue 1 plus attractive ?

Ces équipes sont trop financières. Ce n’est que du business tout cela. Le football français a besoin de Guy Roux ou d’Arsène Wenger. Ils ont une âme et vont chercher des joueurs inconnus pour les lancer. Un type comme Eto’o, c’est une belle histoire : son manager me racontait qu’il était tellement pauvre que la première fois qu’il a goûté à un yaourt, il avait 18 ans.

Eto’o est pourtant souvent décrit comme un joueur égoïste et vénal.

Malheureusement, oui. Mais en réalité, il vient d’une case surpeuplée où ils dormaient à même le sol. Elle est là la vérité. Il a connu la misère. Bref, il n’y a plus qu’Arsène et Guy Roux qui ont encore cette culture de lancer de jeunes joueurs français qui nous ressemblent. Et ça nous fait plaisir, car le foot est notre opium à nous. On ne lit pas Jean-Paul Sartre : pour se distraire on n’a que le foot. Regarde Djibril Cissé : c’est Guy Roux qui l’a fabriqué. Aujourd’hui, il fait le malin et le mec fashion mais ce n’est pas vrai. Je l’ai vu petit, quand Guy Roux le sortait, il lui ordonnait de mettre sa veste pour qu’il n’attrape pas froid.

On sait que les rappeurs et les joueurs de football s’apprécient : quel lien vois-tu entre rap et foot ?

Le lien, c’est la cité ! On vient de la rue, du même monde. Et puis, le foot et le rap c’est un rêve pour tout le monde. Le rêve suprême d’un mec de cité c’est de monter une équipe de foot ou une maison de production de rap. Les filles sont les plus sérieuses aux quartiers, elles réussissent mieux (rires). Mais les ghettos sont remplis de footballeurs et de rappeurs qui ont raté leur carrière.

Et que penses-tu de l’affaire Evra ?

Je crois que les joueurs ne devraient pas trop parler de trucs comme ça. Ils ont un sport qui est au centre de la société, c’est vrai. Tout le monde est focalisé sur les grandes compétitions, que ce soit la Coupe du Monde ou l’Euro. Paraît que certains tueraient leur femme pour ça. Mais les footballeurs ne sont que des pions. Quand un club t’a acheté 100 millions, pour lui tu n’es rien d’autre que de l’argent, il ne s’attend pas à ce que tu l’ouvres. Ils ne devraient pas s’exprimer si ce n’est pour le caritatif.

Dans une interview récente à France Info, tu dénonces le rap bling-bling et  déclares que le rap est une musique de droite qui s’imagine de gauche dans sa Ferrari. N’est-ce pas contradictoire avec le soutien à un Président de droite largement décrié pour son côté bling-bling ?

Pas du tout ! Parce qu’à l’époque j’ai voulu marquer les esprits. J’ai vu que le rap tournait en rond. Comment faire la différence entre un mec qui écoute du hip hop et un mec qui écoute du hard rock ? Rien, si ce n’est qu’ils ont chacun été pris par un souffle différent. Un chanteur peut réellement changer la phase du monde, la musique c’est quelque chose de très fort. Quand je me suis associé à Sarkozy, j’aurais pu soutenir aussi un candidat de gauche. C’est la politique qui est réductrice car elle a toujours été en dessous de ce que nous sommes réellement. Ségolène Royal m’aurait appelé, j’aurais été la voir. Le but est que les gens réussissent et s’en sortent. Quant à ma personne, elle n’est jamais trahi que ça soit avec l’extrême gauche ou l’extrême droite. Mais il faut comprendre que beaucoup de rappeurs sont passés par la gauche pour faire croire qu’ils s’intéressaient au peuple afin de vendre n’importe quoi à n’importe qui. Ceux-là sont des hypocrites qui servent le système et c’est moi qui suis intègre. La preuve, c’est que je suis ici et pas à Los Angeles en train de sniffer de la coke où je ne sais quoi d’autre.

« Il faut comprendre que beaucoup de rappeurs sont passés par la gauche pour faire croire qu’ils s’intéressaient au peuple afin de vendre n’importe quoi à n’importe qui. »

Tapis avec qui tu as chanté est aussi le symbole des dérives bling-bling de gauche…

D’un angle journalistique, tu as raison. Normalement, je n’étais pas sensé discuter avec toi. J’ai grandi près des poubelles, à Porte de la Chapelle. Allez y faire un reportage, vous verrez ce que c’est. Moi je ne suis ni un journaliste, ni un politique. Tapis ça reste le mec qui a fait gagner la Ligue des Champions à Marseille en 1993. Je ne suis peut-être pas assez intelligent mais j’agis avec mon cœur et pas par calcul.

Mais au-delà du bling-bling, le hip hop peut être perçu comme une culture provenant des quartiers dits « populaires ». Tu ne trouves pas que l’association à la gauche est logique ?

Non parce que ce discours est mort. Depuis longtemps, les quartiers ont compris que la gauche les a trahis et qu’elle se sert d’eux pour obtenir des voix. Même s’il y a quelques représentants de « couleur », personne n’est dupe : tout le monde sait que c’est du cinéma. La gauche est aussi bourgeoise que la droite. La France est cependant une société de castes. Gauche et droite ne sont que des frères bourgeois qui s’engueulent (rires). Les immigrés, les pauvres ou les ouvriers ne sont pas leurs priorités. Ils n’ont donc pas à prendre parti dans ces disputes de grandes familles : qu’est-ce que ça peut leur faire ?

On croyait que tu avais quitté le rap game : pourquoi cette envie d’un retour ?

C’est une demande expresse du public qui se morfond du rap d’antan. Il suffit de tous les écouter dire que « c’était mieux avant ». Et puis il y a aussi toute une nouvelle école qui essaie de remettre au goût du jour le rap d’avant. La différence avec nous, c’est que nous essayions d’amener quelque chose de nouveau. Mais le niveau du rap a baissé ces dernières années. Il se situe en-dessous du zéro aujourd’hui. Comme tu le dis si bien, c’est devenu un game. Ce n’est plus une musique avec une histoire. On a fini par oublier les éléments et les fondateurs. Voilà pourquoi inconsciemment tout le monde est à la recherche de l’esprit perdu. Ce que je dis c’est vrai pour tous les activistes, que ce soit les premières bandes – avant moi – ou les plus jeunes. Mais contrairement aux autres, moi j’ai ouvert le rap à des gens qui n’étaient pas censés en écouter.

Que penses-tu de cette nouvelle vague de MC’s qui rappent comme les anciens ?

Comme ce groupe, que je trouve très intelligent, qui essaie de ressusciter l’esprit années 1990 ? Comment il s’appelle ce groupe ? C’est tout un collectif, ils sont nombreux dedans…

1995 ?

Oui, 1995 ! Ils sont très intelligents. Ce sont des jeunes qui ont compris que le rap avait perdu son âme et son essence et qui sont assez cultivés pour savoir où aller piocher. Les jeunes qui n’ont pas ce recul croient souvent, à tort, que le rap est une musique de sauvages. En plus, c’est une musique pratiquée majoritairement par des noirs : ils ne manquent plus que les lances pour les amalgamer à des zoulous (rires). Mais en réalité, c’est une musique qui était très en avance sur les autres. C’est, compte tenu de l’époque, l’égal du rock ou de la pop. Chaque musique a ses grands artistes et ses grands groupes. Mais aujourd’hui, le hip hop est devenu un game qui court après le fait divers. Ce mouvement a perdu toute son intelligence et tout ce qu’il pouvait apporter aux jeunes qui l’écoutaient. Il avait des codes et même une mode. Actuellement, ils sont repris par des bourgeois. Ce sont des éléments qui ont été pris et piochés un peu partout dans la société. Le hip hop a été brisé en mille morceaux et chacun a pris ce qu’il voulait. Maintenant certains font des casques, d’autres reprennent le langage…

Dès ton premier album, avec Classez-moi dans la varièt’ par exemple, tu es très critique vis-à-vis du rap game. Est-ce que le hip hop n’a pas toujours été trop réducteur pour toi ?

Les autres rappeurs ne sont pas assez intelligents, ils ne m’intéressent pas. Qu’est-ce que j’en ai à faire d’un mec qui me raconte ses années de prison et qui m’explique qu’il est très doué dans tel art martial ? Moi, je m’en fous. (rires) Ça n’intéresse personne d’ailleurs. Et pire encore, ça ne fait peur à personne. Les rappeurs ne sont pas des voyous.  Des vrais voyous, tout le monde en connaît et ce n’est pas dans les studios qu’on les trouve. Un voyou c’est quoi ? Un Guadeloupéen, un Corse ou un Algérien. (rires) Plus sérieusement, les vrais durs sont dans la rue et pas dans le rap. Les rappeurs ne sont que des enfants qui rêvent de la vie d’Al Pacino dans Le Parrain. Va demander à MC Solaar ou à n’importe qui d’autre si les rappeurs sont des grands durs !

Tu as récemment dénoncé la misogynie de Booba et tu as dit qu’il était bidon. Pourtant, il n’y a pas si longtemps tu disais qu’il était intelligent. On s’y perd.

Les propos rapportés par les médias marchent de la même manière que les téléphones arabes. Tu dis un truc à une première personne et la dixième ressort totalement autre chose. Je maintiens que Booba est quelqu’un de très intelligent qui joue avec tous les codes. Il s’inspire parfaitement de ce qu’il a observé des plus anciens, sans en refaire les erreurs. Plus jeune, quand on m’a demandé de vendre des t-shirts, j’ai rigolé et refusé. J’ai répondu que j’étais là pour faire de la musique et pas de la vente. Pareil, quand on m’a demandé de jouer au dur et de jouer au voyou. À l’époque, je voulais m’en sortir. J’ai des amis qui se sont retrouvés en prison ou sont morts. J’ai souffert de cette vie de voyou et je voulais la laisser derrière moi. Et puis je pensais à ma famille qui pouvait me voir à la télévision. Mais le public ici a tendance à aimer le radical et veut voir en nous des gens violents. Au fond qui est le rebelle ? C’est celui qui joue de son image de noir pour servir la machine ? Ceux qui jouent aux durs, même quand ils le sont réellement, servent la machine, car c’est ce qu’elle attend de nous. C’est le rôle qu’on nous a assigné. Ce que pourrait faire de mieux Booba, ce serait de faire un album avec Rohff que je produirais : on serait riches comme les noirs américains (rires). Il pourrait aussi dire qu’il arrête la drogue et essayer de donner une bonne image aux jeunes. Mais non, il préfère se montrer de plus en plus fonce-dé et casser des gueules…

Les femmes ont toujours joué un rôle central dans ta musique : penses-tu que leur image s’est dégradée dans le rap ?

Diam’s avait son rôle à jouer mais elle a préféré la religion. Elle a fait ce qu’elle avait à faire et elle a emmené le rap féminin où elle le voulait. Mais à notre époque, nous parlions pour les femmes, en tant que rappeurs. Puis quand Diam’s est arrivée, ça a été son tour. Aux États-Unis, ils ont des Queen Latifah et des Lil Kim. Mais il n’y a pas que l’image de la femme qui est en danger dans le rap. C’est toute l’image du rap qu’il faut sauver. Regarde à quoi ressemble un rappeur ou un amateur de rap dans un film : ils sont vus comme des sauvages.

Pourtant sur Paris, le public rap s’est beaucoup démocratisé ces dernières années…

« Les vrais durs sont dans la rue et pas dans le rap. . Les rappeurs ne sont que des enfants qui rêvent de la vie d’Al Pacino dans Le Parrain.  »

Espérons ! Mais d’après moi les bobos n’écoutent plus de rap, ils ont juste gardé les baskets. C’est fini, ils ont compris qu’il n’y avait rien à gratter de positif. Pourquoi écouter des chansons qui parlent de meurtre ? De même, les rappeurs qui décrivent leur quartier, ça n’a pas de sens, ça n’intéresse personne.

Il n’y a pas que dans le rap qu’on voit cela pourtant : un chanteur comme Renaud, avec Dans mon HLM par exemple, le fait aussi.

Exactement !

Et ton affection pour Renaud est bien connue.

Je dirais de l’affection mais aussi de la désaffection. J’ai fini par comprendre que c’était le genre d’artiste qui profite de la faiblesse des autres. Sauf que je l’ai compris trop tard. Ces artistes jouent aux simples mais ne le sont pas. Tu ne peux pas parler aux gens simples assis dans un salon à Saint-Germain. Après, ça existe aussi des milliardaires rouges… Beaucoup d’artistes sont faux, ils ne sont pas en accord avec leur discours.

Que des numéros 10 dans nos teams

IAM versus NTM. OM contre PSG. Il n’y a décidément pas plus belle époque que ces années 1990. Du temps où coups de coudes et tacles à hauteur de genoux venaient animer le fameux classico français, OM – PSG. Le rap français, lui aussi, s’est cherché une rivalité. Celle-là même qui enflammait déjà côte Est et Ouest des États-Unis. Les groupes IAM et NTM sont choisis pour disputer le match. L’arbitre se nomme Les Inrockuptibles. Match d’idéologie où tensions et joutes verbales se mêlent à l’inévitable question des couleurs footballistiques. Kool Shen attaque le premier : « Moi, je suis PSG. […] [Les Marseillais] vous avez ce côté parano vis-à-vis des Parisiens, mais il y a combien de supporters du PSG à Marseille ? Douze ? À Paris, il y a énormément de supporters de l’OM. » Réponse d’AKH, « Le PSG est une belle équipe, mais on ne peut pas supporter le kob de Boulogne et France Football. » Rien à faire, le Sud et le Nord ne passeront jamais leur vacances ensemble (enfin, à part lors de ce maudit chassé-croisé de fin juillet).

Quelques années plus tard, Nord et Sud de la France reparlent ballon rond. Le collectif IV My People signe la bande originale du très bon documentaire À la Clairefontaine qui suit le destin du fleuron de la formation française. Sur la Cannebière, ce sont les Psy 4 de la Rime qui rappent l’Ohème à l’occasion du projet OM All Stars (2004). La même année, Booba électrise le rectangle vert à coups de crochets et de football champagne.
N°10 permet à Coach B2O d’expérimenter son nouveau schéma de rap uniquement basé sur le culte du meneur de jeu. Le football-rap romantique est né. Arrigo Sacchi, lui, ne peut qu’applaudir.

Mais c’est bel et bien Doc Gyneco qui écrasera la concurrence avec le célèbre Passement de jambes. Sur un beat monstrueux, le Doc accumule les clins d’œil au monde du foot tout en livrant une prestation microphonique remarquable. De Bebeto à Marc Landers, en passant par le célèbre jeu vidéo Kick Off, tout y passe. C’est ce qu’on appelle réussir son passement de jambes tout en flambant sur le beat.

Lamine Belharet

Boîte noire

Swift Guad : « Tu vois au final comment en tant qu’artistes on peut changer les choses »

Interview publiée le 31 mai 2012 sur Sound Cultur’ALL avec Thomas Passe (a.k.a. Nessuno)

swiftAprès avoir retrouvé Swift Guad à la sortie de studio avec Paco – qui revient ! –, direction Robespierre et le Chicken spot pour une interview en compagnie de mon compèreL’Impertinent. Autour d’un sandwich tout y passe : ses débuts, ses nombreux projets à venir, le pourquoi du comment de ses featurings, sa vision du rap, etc… Bref, trêve de présentation, lisez plutôt l’interview du narvalo !

Sound Cultur’ALL : Présente-toi.

Swift Guad : Swift, rappeur de Montreuil, 30 ans. J’évolue dans l’ombre depuis la fin des années 1990-début 2000. Surtout depuis début 2000. On avait créé un label qui s’appelle Horizone, avecPaco et Rossito pour sortir un premier projet. J’ai commencé plus en solo en 2006. Et voilà, je crois que j’ai sorti cinq mixtapes, deux albums. Et y en a d’autres en cours.

SC : Comment s’est faite la création d’Horizone ?

SG : Ça s’est fait à partir d’une rencontre avec Paco, Rossito et Dos FX. On s’est rencontrés aux alentours de 2000 et la structure s’est créée fin 2000-début 2001. Le premier projet qu’est sorti, à part des mixtapes, c’est vraiment le premier album de Paco en 2004, A base de vers durs. Après y a beaucoup de gens qu’étaient sur le label qu’ont pris leur route de leur côté pour cause de divergences. Ça existe encore Horizone Prod. A l’époque y avait vraiment un engouement, dû aux battles, aux clashs. Ça revient beaucoup aujourd’hui. On parle beaucoup de clashs mais c’était déjà ça à l’époque.

SC : T’en as fait pas mal des clashs sur scène ?

SG : Ouais au Batofar, les 12inch Allstar, les Battle Arena, les End of the weak. Déjà début 2003-2004, ça commençait à arriver en force. Après ça s’est calmé, puis là ça reprend avec les Rap Contenders. Mais c’était déjà comme ça à l’époque, fallait faire ses preuves sur scène avant de les faire sur CD.

SC : Un truc qu’est frappant avec toi, c’est que t’arrives toujours à amener de gros noms sur tes albums. Comment t’y arrives ?

SG : Pour les Français en général ce sont des gens que je connais, que j’ai croisé à droite à gauche. Pour les cainris, soit c’est des gens que j’ai rencontrés comme G.O.D ou Twin Gambino, soit c’est moi qui suis allé vers eux. Comme Raekwon, parce que c’était un rêve de gosse en fait. Comme quand t’es petit tu te dis « Je kiffe Ferrari, je veux une Ferrari ». Bah moi je me suis dit « Je kiffe le Wu-Tang, je veux faire un son avec un gars du Wu ». En l’occurrence ça a été Raekwon, donc c’est pas le plus mauvais représentant. Y en a pas eu 30000. Bishop Lamont c’est moi qui suis allé vers lui, pareil pour Raekwon.

SC : Black Milk ?

SG : Ouais mais, avec lui, on n’a jamais été au bout du taf qu’on devait faire. On devait sortir un son, on l’a jamais sorti parce qu’il a lâché cette prod à un autre rappeur, Elzhi. Vu que y avait plus d’exclusivité c’était pas un peu mort. Mais par contre, même si on n’a pas été au bout de la collaboration, c’est quand même lui qui m’a conseillé d’avoir comme choriste Melanie Rutherford. Elle est présente sur mon dernier album, on a fait un son qui s’appelle Besoin de clarté, et franchement c’est une tuerie. Et c’est Black Milkqui m’a dit d’aller voir cette nana-là.

[Aux Etats-Unis] les gars c’est des pros, en France c’est des branleurs

SC : Et t’as jamais eu de problème avec les rappeurs US ? Qu’ils demandent trop de thunes ou bien n’ont pas beaucoup de considération pour les rappeurs français…

SG : Tu sais, eux ils s’en foutent ils écoutent pas de rap français, ils ont juste besoin de remplir leur assiette à la fin du mois. C’est le problème de tout le monde. A partir de là, c’est à toi de négocier le meilleur tarif. Après, c’est ça qu’est bien avec les cainris. Aux Etats-Unis tout le monde est accessible. Si t’es clair avec eux. Tu leur dis « J’aime ce que tu fais, je veux faire un feat avec toi combien ça coûte ? », si tu commences à te branler à leur dire « Ouais, c’est un rêve de gosse comment ça se passe ? » ils te répondront jamais. Les gars c’est des pros, en France c’est des branleurs. Si tu veux faire un feat avec un gars, comme on dit dans les charts, il te répondra jamais. Alors qu’aux Etats-Unis tu peux même avoirBusta Rhymes si t’as le portefeuille qui va avec. Si t’as les contact de l’agence de booking tu peux avoir n’importe quel rappeur. En France c’est pas possible, ils ont tous une tête énorme. Là-bas c’est leur métier, ils vivent de ça.

SC : Y a un featuring que tu rêverais de faire ?

SG : Y en a plusieurs. Des gars comme Al Green, Lee Perry, Busta Rhymes, Mobb Deep, des gens de la soul. Mais non, y a de tout… Lenny Kravitz tiens ! Je me tâte à ça pour le prochain album ! Je suis en train de voir, pour ça que je te dis son nom. J’ai pas de rêve précis en terme de feat, mais j’ai envie de collaborer, d’échanger avec des artistes que j’aime bien quoi.

SC : Tu nous as expliqué la raison pour laquelle ça ne s’est pas fait avec Black Milk, mais qu’est-ce qui s’est passé avec Tricky ?

SG : Oh Tricky c’est différent ! Tu veux qu’on rende l’affaire publique ? On a enregistré deux titres ensemble. Et le problème c’est que partout où il est passé, aussi talentueux soit-il, il s’est toujours embrouillé avec tout le monde. Dans tous les pays où il est passé. Et donc en France il s’est embrouillé avec tout le monde, dont son ingé son avec lequel on avait enregistré. Il est reparti avec son ordinateur sous le bras, donc les sons sont irrécupérables. Le mec j’ai essayé de le recapter mais il est dans une matrice. Tricky il fonctionne en fonction de l’heure qu’il est, s’il se souvient de toi et de la drogue qu’il a pris au moment où tu lui parles. Ca faut le savoir, et c’est dur de collaborer avec des gens comme ça. Même si c’est soi-disant des icônes, dans l’envers du décor c’est plutôt des gros shlags galériens (Rires).

SC : Comment s’est faite la rencontre avec Al Tarba ?

SG : Al Tarba je l’ai rencontré tout jeune, quand il avait 17 ans. A la base il était bassiste dans un groupe de métal et il se mettait au beatmaking. On s’est rencontrés sur MySpace si je dis pas de conneries. Je faisais du son avec Paco, il nous a contactés en nous disant « J’ai écouté votre son, j’aime bien ce que vous faites, tendez une oreille à ce que je fais ». On a tendu une oreille et on a trouvé que le gars était super talentueux. Et la connexion a commencé. Déjà à cet âge-là il mettait beaucoup de gens à l’amende.

SC : C’est toi qui l’a poussé au micro ?

SG : Non pas du tout ! Il travaillait déjà avec ses potes à Toulouse, dans son groupe qui s’appelle laDroogz Brigade. Donc c’est plus dans le cadre de la collaboration avec ses potes qu’il a commencé à se mettre au mic, dans ce collectif-là.

SC : Où en est d’ailleurs le projet en commun ?

SG : On en rigole beaucoup à chaque fois qu’on se voit, parce qu’on nous pose toujours la même question. Mais à la base c’est pas un projet. C’était évident qu’on ferait un projet en commun un jour où l’autre vu qu’on travaille ensemble depuis le début, mais y avait pas de date précise. On a commencé parun son, deux sons, trois sons, puis ça a créé une attente. Mais les gens j’ai envie de leur dire que ça sortira dans 10 ans, à base d’un ou deux sons par an (Rires). On n’est pas pressés, on fait les choses comme elles doivent se faire. En tout cas dans mon prochain album il aura une place, une ou deux prods qu’il va placer et on va continuer à enregistrer des morceaux. Ça prendra le temps que ça prendra, mais on n’est pas pressés.

SC : T’avais aussi annoncé le projet R.O.C.K.S, c’en est où ?

SG : C’est un peu tombé à l’eau. Par ma faute je t’avoue. Parce que c’est moi qui suis un peu à droite à gauche pour plein de projet en même temps. Dès le début je savais que j’allais sortir Hécatombe 2.0, j’avais plein de projets en parallèle comme le projet Inglorious Bastardz. Ma prochaine mixtape aussi, à la base ça devait être Conçu Pour Casser Du MC Volume 2, mais au final ça s’appellera la Narvalow tape. Dès le début avec R.O.C.K.S on savait que j’allais être accaparé par mes trucs, et c’est moi qui l’ai fait flancher. Tu sais, le concept était bon, y a pas de raison qu’on se remette pas au boulot bientôt.

SC : Tes prochains projets sont donc la Narvalow tape et Inglorious Bastardz, parles-nous en un peu plus…

SG : Exactement. Alors la Narvalow tape c’est au mois de septembre, Inglorious Bastardz c’est fin septembre-début octobre et mon prochain album qui s’appelle Ton rappeur préféré c’est mi-octobre.

Pour la première fois, je fais un album pour m’amuser

SC : Trois CDs à la rentrée ?

SG : Ouais, mais j’ai toujours un peu plus de cœur pour l’album ! Surtout que là j’essaie de faire quelque chose de différent, donc on verra bien. Pour la première fois je fais pas du rap sombre en étant sérieux le cul serré. Pour la première fois, je fais un album pour m’amuser. Pour me décontracter un peu. Même les sons énervés ils sont traités de façon un peu, pas rigolotes mais second degré. On n’arrête un peu de se prendre au sérieux, parce que c’est ça le problème du rap quoi.

SC : Ce sera plus dans le délire de Dansez sur ma bite quoi ?

SG : Tout à fait, tout à fait ! Pas forcément de l’egotrip, mais au moins léger on va dire.

SC : T’as pas peur de perdre une partie de ton public en faisant ça ?

SG : Pas du tout parce que je m’en fous un peu des fans (Rires) ! C’est pas forcément ceux qu’achètent ton album. Donc non au contraire, je peux qu’en acquérir d’autres. De toute façon, les fans ça va ça vient, c’est comme tout. Là, par exemple, t’as un grand mouvement avec 1995 et L’Entourage, que je connais, qui font un gros buzz. Et donc ça fait un an que j’ai de plus en plus de gens qu’écoutent mon son et qui sont très jeunes. Donc les fans ils viennent ils vont, ils t’écoutent parce que t’as sorti un son, le lendemain ils t’écoutent pas. Le but c’est justement de pas toucher les gens qui t’écoutent mais ceux qui t’écoutent pas. Et limite qui n’aiment pas ce que tu fais. C’est plutôt ça l’intérêt. Après je dis pas que je vais faire de la musique classique pour France Inter. Je sais que j’ai déjà été sollicité pour qu’on étudie des textes de mes chansons dans des facs. Ça a quand même plus de valeur pour moi d’être étudié par des jeunes qu’apprennent mes textes plutôt que de sortir des disques et faire de l’oseille pour être écouté par des petits de 15 ans qui comprennent même pas ce que tu dis.

SC : T’as déjà des feats de prévus pour ces trois albums ?

SG : Inglorious Bastardz, c’est le collectif avec moi, Jeff le Nerf, Furax, 10vers, deux groups de Suisse,Le S’1drom et L’Insolence et Scylla, un Belge. Donc c’est un gros collectif. Pour la mixtape y aura pas mal de featurings. Notamment le son que j’ai fait avec Nekfeu, La tête dans la baignoire, Jeff le Nerf, Furax, Hugo Boss, on s’est vus tout à l’heure. Donc pour la mixtape plein de feats, pour l’album je t’avoue que je sais pas encore, je peux pas trop en parler. Moi-même je sais pas encore qui je vais mettre dans les sons que j’ai faits. C’est plus une démarche artistique, j’ai envie que le son me ressemble. C’est pas « Untel c’est vla le featuring » alors je vais le mettre. Faut que le son colle à l’album. Là pour une fois y aura pas de cainris pour lesquels je me serais cassé la tête pour les ramener. Y aura peut-être des cainris, mais ce sera pas la même démarche.

On n’est que des vieux dans ce groupe, la moyenne d’âge ça doit être 30 ans, c’est pas glorieux pour les Inglorious Bastardz (Rires)

SC : Comment ça s’est fait les Inglorious Bastardz ? Vous venez un peu des quatre coins de la francophonie…

SG : C’est venu en fait d’une démarche commune. Ça a beaucoup été fait à l’initiative d’un Suisse qui s’appelle Neka, du collectif Rootscore et du groupe Le S’1drom. C’est un gars chez qui Furax enregistre à Genève, mon pote 10vers aussi. C’est des potes à moi, on se voit souvent, ça s’est fait familialement on va dire. On n’est que des vieux dans ce groupe, la moyenne d’âge ça doit être 30 ans, c’est pas glorieux pour les Inglorious Bastardz (Rires). On se débrouille bien et on lâche pas l’affaire. Après je vais pas te vanter les mérites de chacun. Furax, ceux qui le connaissent savent que c’est vla le kickeur. Jeff le Nerf est là depuis le début, même Kool Shen s’est pas trompé, il l’a pris sous son aile, l’a fait signer chez AZ, l’a placé sur tous les projets. 10vers c’est un rappeur de Toulouse, de la Bim Bam Prod, pareil c’est un gars qu’est là depuis 10-15 ans, il a fait tourner des rappeurs, il a organisé trop de trucs. Scylla pareil, les gens ont juste à taper son nom sur YouTube pour aller voir ce qu’il fait, c’est un des seuls Belges qu’arrive à casser les frontières et venir s’installer en France. C’est une bonne réunion de MCs quoi.

SC : Tu fais également partie du collectif Narvalow Club aussi, qui réunit des artistes divers, tu peux nous en parler aussi ?

SG : Ça c’est pas spécialement rap, c’est une association un peu montreuilloise. Ça regroupe de tout : des peintres, des graffeurs, des tatoueurs, des rappeurs, des photographes, des réalisateurs, etc… Après au début c’était super actif dans l’organisation d’évènements, d’expos et de concerts. Maintenant ça s’est calmé parce que c’est difficile de fédérer tous les artistes. On y arrive mais ça reste marginal. On essaie de faire deux-trois évènements par an. A côté de ça on a développé toute une série de t-shirts. Même si l’esprit Narvalow arrive à se diffuser, parce que je vais pas te cacher que la plupart des gens qu’achètent nos t-shirts c’est des gens de province, et pas de Montreuil. L’esprit est bien représenté quoi.

SC : Tu portes quel regard sur la scène rap actuelle ?

SG : Un regard un peu positif, parce qu’artistiquement ça change de gueule. Tu l’as bien remarqué, on revient un peu à un rap à l’ancienne. Celui que j’affectionne, que j’apprécie. Après le côté négatif c’est la manière dont les médias ont retourné leur veste. Ils boycottaient tout le monde et depuis ils sucent tout le monde. C’est bien, mais tu vois au final comment tous en tant qu’artistes on peut changer les choses. Ouais on a fait un peu vaciller les médias (Rires). Mais après c’est un peu du suçage de bites, mais ouais j’ai un regard positif parce que ça change. Surtout qu’en tant que vieux je trouve ça bien que y ait une nouvelle génération qu’arrive, des gens qui sont passionnés. Qu’ont pas subi le rap qu’on leur a mis de force dans les oreilles. Y en a ils vont dire « Ouais les jeunes cons, les jeunes cons », ouais mais les jeunes cons c’est nous y a dix ans ! Donc moi j’aime bien ce petit renouveau.

Moi j’ai suivi mon truc, sauf qu’à l’époque c’était plus compliqué. Aujourd’hui ça s’ouvre, donc j’en profite un peu pour rentrer dans la brèche

SC : C’est vrai que y a un petit retour aux sources, comment tu le vis toi qu’est un peu un pionnier de ce mouvement avec des gars comme Flynt, le TSR, etc…

SG : Bah moi je suis pas retourné aux sources, j’en faisais déjà depuis longtemps. Mais à l’époque y avait les Sages Po, Time Bomb et ces petits jeunes ils écoutent ça quoi. Mais non j’ai pas l’impression d’être un pionnier, moi-même j’étais une groupie quand j’étais petit. Moi j’ai suivi mon truc, sauf qu’à l’époque c’était plus compliqué. Aujourd’hui ça s’ouvre, donc j’en profite un peu pour rentrer dans la brèche. C’est bien qu’il y ait cette nouvelle génération qui a ouvert la brèche grâce à internet, aux nouveaux médias qu’on leur a mis à disposition. Nous on n’a pas su l’utiliser, eux ils ont grandi avec ça. Pour eux c’est normal, pour nous c’était un effort de s’y adapter. Pour eux c’était logique, c’était normal, si t’es pas dessus t’es mort. Tu me parles de n’importe quel artiste qu’a entre 20 et 25 ans je te dirai qu’il a un Facebook, un Twitter, un compte Google+ quoi. Ça coule de source (Rires).

SC : D’ailleurs toi à l’époque du premier album t’étais un rappeur underground, aujourd’hui t’es plus dans la lumière, t’as plus de buzz. Tu fais plein de scènes, plein de feats, comment tu l’as ressenti ?

SG : Ouais mais c’est la force des choses qu’a voulu ça. Avant je faisais mon son, on me proposait pas de faire des lives, maintenant ça s’est développé. C’est bien. Moi je me suis adapté aussi. Surtout que j’ai vieilli, j’ai plus du tout le même discours que quand j’avais 20-25 piges. Quand t’as plus de 30 ans tu sais… Je me modère pas dans le discours, j’ai toujours les mêmes principes et idéaux. Mais j’ai vieilli donc forcément je suis un peu plus sage. Même si je dis encore des conneries, même beaucoup ! Mais c’est comme les mecs qui disent « Fuck Skyrock ! Fuck Skyrock ! » alors que la seule chose dont ils rêvent c’est d’y passer ! Mais quand t’arrives à cet âge-là tu comprends que c’est de la bêtise de dire « Fuck Skyrock », parce que le jour où ils vont t’appeller pour faire un freestyle tu vas courir comme un petit chien !

SC : T’en vis à l’heure actuelle du rap ou tu travailles à côté ?

SG : J’ai toujours travaillé. Maintenant je travaille à mi-temps. Le rap j’en vis dans le sens où je fais de l’oseille avec mes concerts. Mais après je me dévore, tu vois je charbonne pour vendre des disques et faire des concerts. Mais après le problème c’est que c’est toujours irrégulier, tu sais pas combien tu vas gagner en septembre puis au mois d’octobre. Mais au moins ça se débloque ! Avant y avait pas de concerts, maintenant y en a vla le tas. Je trouve ça bien, mais après faut être malin, savoir travailler avec les gens. Le problème du rap français c’est qu’il a toujours été renfermé sur lui-même : « Fuck untel ! Fuck untel ! Fuck untel ! ». Aujourd’hui le rap s’est ouverts, on travaille avec des tourneurs, avec des médias, on a des marques de fringue, des trucs comme ça. Je pense que c’est aussi pour ça qu’on en parle aujourd’hui, parce qu’à l’époque le rap français n’était réservé qu’à certains médias privilégiés.

SC : Question conne : t’es vraiment employé à la mairie de Montreuil ?

SG : Ouais, je suis fonctionnaire. Je suis fonctionnaire depuis 7 ans. Je t’avoue j’ai pas eu de diplômes, donc ma mère elle m’a dit : « Tu bosses et tu remplis le frigidaire ou tu te barres et tu fais ta vie ». Du coup je me suis mis à bosser et je me suis barré (Rires) ! C’est une bonne expérience, j’ai pas eu le bac mais je vais pas faire le misérabiliste parce que j’ai toujours eu du travail. Ça m’a permis de faire mon son tranquille. Tu sais, la plupart des rappeurs, aussi côtés soient-ils, bossent à côté. C’est ça le juste milieu entre l’indé et la maison de disque : la maison de disque ils vont se foutre de ta gueule, t’es sûr de toucher moins d’oseille mais d’en vivre, l’indé c’est au jour le jour et tu sais jamais combien tu vas gagner à la fin du mois.

SC : Un mot de la fin ?

SG : Le mot de la fin c’est que le prochain album sort à la rentrée, et que le maximum de personnes qui l’achètent fera que j’en sortirai un prochain (Rires) !

Facebook de Swift Guad

Twitter de Swift Guad

Facebook des Inglorious Bastardz

Facebook du Narvalow Club

 

Propos recueillis par : Nessuno & L’Impertinent

 

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Tu sais que t’es un puriste (en carton) du rap quand…

Texte publié le 4 mars 2012 sur Sound Cultur’ALL, avec Thomas Passe (a.k.a. Nessuno)

RAP_MIEUX_AVANT_NOIR_01_298x298Depuis tes années collèges, tu écoutes du rap en boucle, ou du moins Skyrock. Mais, récemment, ta vie en a été bouleversée : t’as compris que tu n’étais pas catalogué parmi les « connaisseurs » de hip hop. Une grande incompréhension et un profond mal-être t’ont envahi mais t’as décidé de remédier à cet épineux problème en faisant ton entrée par la grande porte parmi « l’élite » des auditeurs. En un rien de temps, tu as écumé les forums et sites spécialisés, tu as jeté à la poubelle tes vieux albums de La Fouine (ou de Sniper ouStomy Bugzy pour les plus anciens) et t’as couru t’acheter Illmatic de Nas ! Bref, tel Magicarpe en Léviator, t’as réussi ta transformation en (néo)-puriste du rap et tes goûts sont désormais supérieurs à ceux d’autrui. Tu te reconnaîtras forcément dans la liste qui suit…

Tu sais que t’es un puriste (en carton) du rap quand…

  1. Tu as un rapport quasi-religieux avec ta musique, pour toi rien ne peut justifier le fait de l’avoir sali ou de lui manquer de respect.
  2. T’écoutes jamais le second album d’un artiste, tu sais qu’il aura forcément baissé son froc entre temps.
  3. Tu chies constamment sur Skyrock que tu tiens pour responsable de tous les maux du rap… Pourtant, si demain matin une bande de guignols t’appelle en te faisant des blagues que tu trouvais déjà immatures à 12 ans, tu répondras forcément « Skyrock ! » quand ils te demanderont quelle est ta station de radio préférée.
  4. Tu as un profond sentiment de nostalgie quand tu penses à ce qu’était Génération dans le temps…
  5. T’écoutais 1995 il y a un an mais maintenant tu leur chies dessus allègrement.
  6. En lisant le point précédent t’as d’ailleurs eu une sensation de déjà-vu en pensant à la Sexion d’Assaut, Orelsan ou même Booba… Mais pas avec La Fouine.
  7. Il y a 2 ans tu pensais que 0.9 était le meilleur album de Booba, maintenant tu ne jures plus que parLunatic et Temps Mort et exècres ceux qui s’en sont suivis.
  8. Tu portes des t-shirts « Le rap c’était mieux avant » alors que ça fait 5 ans que t’en écoutes.
  9. T’as jamais écouté la moitié de tes 20 albums de références
  10. Public Ennemy est, pour toi, l’un des plus grands groupes de l’histoire du rap US, alors que tu ne connais pas une seule de leur chanson.
  11. T’es capable de démontrer à n’importe qui que Talib Kweli est l’un des plus grands lyricistes du rap US et que Rick Ross écrit comme ses pieds, alors que tu parles anglais comme une vache espagnole.
  12. Tu détestes les rappeurs français qui ne font que de l’egotrip ou se vantent de leurs exploits criminels alors que tous les rappeurs américains que tu écoutes en font de même.
  13. T’es pour la discrimination positive : 5 de tes 10 rappeurs français préférés sont blancs.
  14. Tu déteste les rappeurs qui foutent des meufs à poil dans leurs clips… Mais tu adules Ludacris !
  15. Tu détestes les rappeurs qui mélangent rap et r’n’b’, pour toi c’est la perversion du Hip Hop… Pourtant 2Pac, Biggie et Fabe sont tes dieux !
  16. Pour toi Temps Mort de Booba et Marshall Mathers d’Eminem sont les derniers classiques du rap français et américains.
  17. Tu détestes le Dirty South… Mais tu adules Ludacris !
  18. 1990 d’Orelsan t’a rappelé des souvenirs, pourtant t’as pas compris la moitié des références.
  19. Tu trouves tout de même dommage que ce titre ait été fait par Orelsan.
  20. Oxmo Puccino est pour toi le seul rappeur actuel avec une discographie parfaite… Pourtant quand on te demande de citer une track de Cactus de Sibérie, tu bugges.
  21. « Qui prétend faire du rap sans prendre position ? » est ton hymne, Notorious B.I.G. est ton rappeur préféré, le Wu Tang Clan est ton groupe référence… pour toi tout est cohérent.
  22. Kool G Rap est pour toi le meilleur rappeur du Queens loin devant Nas et Prodigy… Pourtant quand on te demande de citer une track de lui, tu bugges encore.
  23. T’as des envies de meurtres ou de viols à chaque fois que t’entends un beat électro, cependant, DJ Mehdi est selon toi le plus grand beatmaker que la France ait portée… pour toi, tout est cohérent toujours.
  24. Quand on t’a dit que Rocca faisait un titre avec Alpha Wann de 1995, t’as demandé à ton interlocuteur de te foutre une baffe pour t’assurer que tu ne faisais pas un cauchemar.
  25. Tu fais une descente d’organe chaque année au lendemain des nominations pour les Victoires de la musique.
  26. T’as fait un arrêt cardiaque hier en voyant qu’Orelsan était récompensé. Mais ça va mieux aujourd’hui, t’as vu que c’était que le prix du meilleur album de musiques urbaines et pas celui de rap. Quoi ? Cette appellation de guignols désigne le rap ?
  27. T’as d’ailleurs fait une syncope deux années de suite au moment des Trophées du Hip Hop et ta tension chute à chaque évocation de Yassine Belattar.
  28. En soirée, tu te fais chier royalement.
  29. Tu t’y fais d’ailleurs constamment insulter quand t’essaies de mettre du Casey discrètement.
  30. Tu détestes encore plus Booba que les fans de Rohff.
  31. A bien y penser, tu détestes également Rohff.
  32. Tu les hais surtout pour avoir eu le culot de sortir un deuxième album (et d’autres après)… Par contre tu hais Sinik pour avoir eu le culot d’avoir commencé le rap.
  33. Tu hais les clashs dans le rap français, tu adores pourtant les diss tracks dans le rap US.
  34. Il y a trois choses que tu détestes plus que tout au monde : Skyrock, les majors et les refrains chantés. Pourtant, tu adules Fabe.
  35. D’ailleurs tu attends son retour comme les Chrétiens attendent celui du messie.
  36. Tu attendais aussi celui de Rocca, mais depuis qu’il rappe avec Alpha Wann, tu penses qu’il tient finalement plus de Judas que du Christ : Qu’il aille se pendre !
  37. Pour toi un beat boom bap, fait en 10 minutes avec un sample cramé et des kits de batteries et de basses téléchargés sur internet, vaudra toujours mieux qu’un beat électro sur lequel le beatmaker a passé des jours.
  38. En bon fan de la Scred, t’es en quelque sorte « Vieux avant l’âge ».
  39. Au final tu détestes plus que tu aimes ta musique.
  40. Tu te fous de tes contradictions et incohérences parce qu’au fond être un puriste, pour toi, tient plus d’un certain état d’esprit que d’une quelconque rationalité. Et au fond, cette musique, bah tu l’aimes.

Nessuno et L’Impertinent