Entretien accordé au magazine en ligne Aleteia
Aleteia : D’où vient le besoin d’accumuler si caractéristique de notre société ?
Kevin Victoire : Le « besoin d’accumuler » a été très longtemps condamné par toutes les sociétés. Dans la Grèce antique, l’hybris – c’est-à-dire la démesure – constituait un crime. C’est l’opposition à cet hybris, par la tempérance ou la « juste mesure » d’Aristote, qui fonde l’éthique grecque. L’accumulation de richesse, qu’Aristote nomme la « chrématistique », est alors condamnée moralement. Le mythe du roi Midas, qui acquiert auprès du dieu Dionysos la faculté de transformer tout ce qu’il touche en or, au point de devenir incapable de manger et de boire, illustre très bien ce propos.
L’accumulation sans fin des richesses est également dénoncée dans la tradition judéo-chrétienne. « Malheur à ceux qui ajoutent maison à maison, et qui joignent champ à champ, Jusqu’à ce qu’il n’y ait plus d’espace, Et qu’ils habitent seuls au milieu du pays ! » explique le prophète Isaïe (5, 8). C’est évidemment encore plus clair dans le Nouveau testament où l’accumulation excessive de biens matériels est toujours opposée à l’élévation spirituelle : « Nul ne peut servir deux maîtres. Car, ou il haïra l’un, et aimera l’autre; ou il s’attachera à l’un, et méprisera l’autre. Vous ne pouvez servir Dieu et Mamon » (Matthieu 6, 4) ; « Et que sert-il à un homme de gagner tout le monde, s’il perd son âme ? » (Marc 8, 36), etc.
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